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Bail emphytéotique : présentation, utilité et fonctionnement

Par Philippe , le 26 mai 2023 , mis à jour le 19 septembre 2023 - 15 minutes de lecture
Présentation, utilité et fonctionnement du bail emphytéotique

Il existe différentes formes de baux qui peuvent engager le bailleur, le propriétaire mettant son bien en location, et le preneur, aussi désigné par locataire. Parmi ces différentes formes de baux, nous pouvons citer le bail emphytéotique, également connu sous l’appellation emphytéose. Il s’agit d’un type de bail liant par écrit le bailleur, propriétaire, et l’emphytéote, le locataire. Le bail emphytéotique se démarque des autres baux sur plusieurs points, dont la durée, que les deux parties peuvent définir jusqu’à 99 ans ou plus selon le pays. L’emphytéote peut pleinement utiliser son droit de propriété sur le bien en location durant la période de validité de contrat. Lorsque celui-ci prend fin, toutes les constructions et améliorations apportées par ce dernier reviendront de droit et de manière automatique au propriétaire initial. Ce transfert de propriété ne donne lieu à aucun versement d’indemnités venant du côté du propriétaire.

Le bail emphytéotique : qu’est-ce que c’est ?

Par définition, un contrat de bail correspond à un document légal permettant de formaliser la location d’un bien, et de définir par la même occasion les droits et les obligations du bailleur et du preneur.

Un contrat de bail est nécessaire pour déterminer les conditions de location d’une maison, d’un local commercial et autres biens immobiliers. Grâce au bail emphytéotique, le preneur ou l’emphytéote bénéficie du droit de jouissance du bien mentionné dans le contrat et pendant la durée prévue par les deux parties, moyennant une somme, un loyer, qu’il doit verser au bailleur ou propriété du bien. Autrement dit, le propriétaire est tenu de mettre la maison, l’appartement, le local, le terrain à disposition du preneur et ce dernier de son côté a l’obligation de lui verser le montant de la location.

Il existe plusieurs types de contrats de location que deux acteurs, en qualité de bailleur et preneur, peuvent mettre en place. Un document important, chaque contrat de bail détient des spécificités qui lui sont propres. Dans le cas d’un bail emphytéotique, également une forme de contrat de bail, dit aussi emphytéose, il se différencie surtout par la durée de validité du contrat. En effet, les droits ainsi que les obligations du bailleur et du preneur peuvent être engagés entre 18 ans minimum et 99 ans maximum. Cette période peut s’étaler à 999 ans, plusieurs générations d’une famille, dans des pays de l’Afrique (Zimbabwe, Kenya, etc.).

Un contrat de bail emphytéotique donnant également lieu au paiement d’un loyer. Une obligation que le preneur doit s’acquitter en faveur du propriétaire du bien, les deux parties pouvant librement définir le montant de la location. Les contractants devront cependant s’entendre sur un montant décent compte tenu de la durée assez longue du contrat.

Avec un bail emphytéotique, l’emphytéote bénéficie ainsi des attributs du droit de propriété (usus et fructus), c’est-à-dire le droit de disposer et de jouir du bien, d’en percevoir les fruits et de le céder (vendre) à un tiers, dans certains cas.

Le locataire peut ainsi réaliser des aménagements, des constructions, des améliorations et réaliser une activité professionnelle sur le lieu, dans la limite du contrat.

Il ne fait pas partie des prérogatives du preneur, toutes actions amenant à la dévalorisation du bien immobilier ou à sa destruction. En d’autres termes, toutes modifications pouvant diminuer la qualité du bien sont à proscrire avec ce type de contrat de bail. Il est à noter qu’arriver à l’échéance du bail, le plein droit de propriété revient au propriétaire, et cela, sans qu’il ait besoin de payer une compensation au locataire.

Historique du bail emphytéotique

Le bail emphytéotique trouve ses racines dans l’Antiquité romaine. À cette époque, il était connu sous le nom d’emphyteusis et était principalement utilisé pour encourager la mise en valeur des terres agricoles qui étaient autrement laissées en friche.

Les principaux éléments de ce bail antique étaient :

  • Durée prolongée : ce qui permettait au preneur d’amortir ses investissements sur le long terme.
  • Obligation de mise en valeur : le preneur devait cultiver ou construire sur le terrain pour le rendre plus productif.
  • Paiement d’un canon : une sorte de loyer ou de redevance était versé au propriétaire initial.

Au fil des siècles, le concept d’emphyteusis a évolué et s’est adapté aux besoins économiques et sociaux de différentes époques, tout en conservant ses caractéristiques fondamentales.

Aujourd’hui, le bail emphytéotique est utilisé dans de nombreux pays et contextes, allant de l’agriculture à l’immobilier urbain, mais son essence reste centrée sur la mise en valeur à long terme d’un bien.

Dans quel cas mettre en place un bail emphytéotique ?

Les propriétaires choisissent de mettre en place ce type de contrats pour valoriser leur bien, grâce notamment aux constructions ou modifications que vont réaliser les locataires.

La pratique du bail emphytéotique a pris racine dans les milieux ruraux. En ces temps, il était très fréquent et se plaçait en faveur des propriétaires de vastes terrains à construire, mais qui malheureusement ne disposaient pas des moyens financiers pour financer un projet de construction.

Le propriétaire en question pouvait ainsi mettre son bien en location afin que le locataire travaille sa terre et la rend exploitable. Le preneur percevait les fruits et le bailleur, le loyer. Le bail emphytéotique présente le même principe de fonctionnement, c’est-à-dire qu’il valorise les terrains dans le cadre du contrat sans avoir à s’acquitter d’un montant de charges quelconque.

Cette valorisation du bien immobilier par les preneurs à travers les transformations qu’ils réalisent demeure aujourd’hui la motivation des propriétaires à contracter un bail emphytéotique. Et ce qui est le plus intéressant est que la mise en location concerne tous les types de biens immobiliers (logement, maison, terrain nu, local commercial, etc.). D’ailleurs, le bail emphytéotique se pratique et prend davantage d’ampleur en zone urbaine.

Les avantages apportés par le bail emphytéotique à l’emphytéote ne sont pas également des moindres, bien qu’il doive payer le prix de la location. L’emphytéose permet à un preneur de profiter sur le long terme, des plus-values générées par son investissement dans les travaux de construction. Il jouit entre autres d’un droit réel sur la propriété mentionné dans le contrat.

À retenir

La raison qui fait qu’un propriétaire établisse un contrat de bail emphytéotique est de pouvoir accroître la valeur de son bien immobilier sans faire d’investissement. Quant au locataire, il s’agit de pouvoir exploiter le bien d’un tiers et d’en percevoir les revenus.

Quels sont les caractéristiques du bail emphytéotique ?

Ce contrat de bail est caractérisé par 3 principaux éléments dont :

  • Les prérogatives du preneur en termes de droit réel de propriété ;
  • Le paiement du loyer par le preneur ;
  • La durée du contrat.

La notion de droit réel dans le cadre d’un bail emphytéotique

La mise en place d’un contrat de bail emphytéotique implique directement que le droit réel lié au bien (terrain, maison, local, etc.) appartient au preneur. Plus simplement, le bénéficiaire du droit d’usufruit avec ce type de contrat est l’emphytéote. Ce dernier peut disposer et jouir du bien comme il l’entend, en percevoir les avantages pécuniaires, à condition d’en assurer sa conservation.

Les prérogatives du preneur ne se limitent pas à l’usufruit du bien. En effet, il peut :

  • Hypothéquer le bien immobilier ;
  • Donner à louer une partie et le bien en son intégralité. Une opération de cession est cependant strictement interdite. Cette condition intervient notamment pour une durée de contrat de vente supérieure à la durée du contrat emphytéose ;
  • De vendre son droit d’usufruit (toute ou seulement une partie) ;
  • D’exploiter le bien pour augmenter sa valeur à travers des travaux de construction, de rénovation, etc. En contrepartie des modifications apportées, le preneur peut jouir des bénéfices issus du bien.

Le point sur la période de validité du bail emphytéotique : sa durée

S’il a été soulevé plus haut que la durée d’un bail emphytéotique peut différer d’un pays à un autre, pour la France notamment, elle est comprise entre 18 et 99 ans. Certains points méritent cependant d’être soulevés pour les conditions liées à la durée de ce type de contrat qui est strictement encadré par la loi.

  • La formule de reconduction tacite du contrat emphytéotique est interdite par la législation. Plus simplement, un renouvellement automatique du contrat n’est pas possible quand bien même le bailleur et le preneur n’envisagent pas la rupture du bail arrivé à son terme. Les deux parties doivent manifester leur souhait par la signature d’un nouveau contrat pour que celui-ci soit valide. Quoi qu’il en soit, des dérogations peuvent avoir lieu dans certains cas ;
  • La durée du bail fixée et validée par les contractants ne peut en aucun cas être modifiée.

Que gagne le propriétaire en contrepartie ?

Selon la loi, le locataire ou l’emphytéote doit verser au propriétaire, une compensation financière afin de pouvoir disposer pleinement du bien, jouir du droit réel et exploiter le bien pour en percevoir les avantages monétaires.

Cette compensation est, en droit commercial, désignée par canon emphytéotique. Elle intervient dans la majorité des cas à titre symbolique. La durée du bail étant assez longue, le preneur peut être lésé dans le cas où il verserait un montant important. Il est également à noter que le canon emphytéotique peut s’apparenter à un apport en nature. Ce qui n’exclut pas l’obligation de construire et d’entretenir de ce dernier dont les frais sont tous à sa charge.

L’emphytéote peut opter pour un paiement mensuel ou annuel du canon emphytéotique. Les conditions doivent préalablement être prévues dans le contrat de bail.

Bon à savoir

Le preneur est redevable de la taxe de la publicité foncière relative à la propriété bâtie. Cette redevance est due sur le cumul du montant des années de validité du bail.

Que mettre obligatoirement dans le contrat de bail emphytéotique ?

Un bail emphytéotique doit faire mention de plusieurs éléments. Ce document administratif doit comprendre obligatoirement :

  • La durée de validité du contrat qui est définie par le bailleur et le preneur ;
  • La description du bien immobilier, selon que le patrimoine est mis en location, ses caractéristiques, son implantation géographique ;
  • La provenance du patrimoine ;
  • Les détails relatifs aux charges de l’emphytéote, dont le montant ou le type (apport en nature) ;
  • Les signatures des parties prises dans le contrat (propriétaire et locataire).

Pour être valable aux yeux de la loi, le contrat de bail emphytéotique doit être établi et signé, dans le respect des formalités légales, par un notaire.

Rédaction d'un contrat de bail emphytéotique

Droits et obligations dans le cadre d’un bail emphytéotique

Dans un contrat, chaque partie a des obligations à respecter et à honorer. Ainsi, les obligations du bailleur répondent aux droits du preneur et inversement. Nous allons apporter plus de détails à cela.

Les engagements du bailleur

Les obligations du bailleur sont simples. Étant le propriétaire du bien, il s’engage à mettre à disposition du preneur la propriété immobilière mentionnée dans le contrat de bail.

Quelles sont ses prérogatives ?

Avoir des obligations signifie qu’il bénéficie également de droit. C’est-à-dire que le bailleur a droit au canon emphytéotique. Des non-paiements de cette redevance sur une période de deux ans par l’emphytéote impliquent que le bailleur peut demander à résilier le bail emphytéotique.

Si le preneur ne respecte pas ses engagements dans le cadre de son droit usufruit, et que de suite à cette négligence découlent une forte dégradation ou un grand endommagement du bien ou des transformations réalisées, le bailleur est également en droit de résilier le contrat sans l’accord du preneur. Les baux de ce type arrivent rarement à échéance, les incidents et imprévus sur une durée de location aussi longue ne sont pas limités.

À retenir

Le bailleur n’est pas en droit d’imposer au locataire la conduite d’une construction ou d’une modification du bien.

Quelles sont les obligations du preneur ?

Il existe aussi des obligations que le preneur doit honorer selon les conditions prévues par le contrat. Il s’agit

  • Accroître la valeur du bien immobilier. Par opposition au bail à la construction, le bail emphytéotique n’a pas seulement caractère à engager à entreprendre des constructions sur le terrain du bailleur et conserver leur état ;
  • S’acquitter du paiement de la redevance, auquel cas, le bailleur a le droit de demander une résiliation en cas de manquement à cette obligation sur une longue durée ;
  • Conserver et entretenir le bien mis en location, de même que les constructions effectuées ;
  • Payer la taxe de la publicité foncière, les charges connexes auprès de l’administration fiscale.

Bon à savoir

En plus d’entretenir le bien loué, le preneur est interdit de conduire toutes formes de travaux visant à la destruction du bien, le contrat une fois arrivée à échéance.

À noter que, si l’une des parties ne respecte pas ses obligations, l’autre partie peut demander la résiliation du bail avant son terme. Par exemple, si l’emphytéote ne paie pas le canon pendant une période prolongée.

Et pour ses droits ?

La mise en place de l’emphytéose implique que le titre de propriétaire appartient au preneur tout au long de la validité du contrat de bail. Dans ce cadre, il peut aménager et construire à son avantage.

Quelles sont les formes de baux emphytéotiques ?

Les bailleurs et les preneurs peuvent s’engager dans deux principales catégories de baux emphytéotiques

  • Le bail emphytéotique ordinaire ;
  • Le bail emphytéotique dit administratif.

Le bail emphytéotique privé

Ce type de bail concerne principalement les espaces ou les domaines privés qui appartiennent à la collectivité. Les baux emphytéotiques privés ont également une durée de validité comprise entre 18 ans et 99 ans.

Un bail emphytéotique privé vise les mêmes objectifs évoqués plus haut ainsi que présente les mêmes droits et obligations pour les deux parties prises dans le contrat.

Le bail emphytéotique administratif

Ce type de bail se fait le plus souvent entre une personne (physique ou morale extérieure au contrat) et une collectivité territoriale. Il s’agit de la location des biens immobiliers à une tierce personne qui dispose du droit de construction ou de rénovation sur les biens en question.

Dans le cadre de ce contrat, le preneur réalise les constructions sur le domaine public qui lui permettra ensuite de mettre les constructions en location auprès d’une collectivité.

L’objectif du bail emphytéotique administratif est de servir l’intérêt général à travers les fruits du bien immobilier.

Remise des clés d'un bien après la signature d'un bail emphytéotique

Quid du système fiscal de ce type de bail ?

La taxe à laquelle le bail emphytéotique est soumis est la taxe sur la publicité foncière. Le paiement de cette taxe revient au preneur au taux de 0,7 % quelle que soit la durée du contrat en place.

Le propriétaire peut néanmoins choisir de ne pas soumettre le bail emphytéotique à la TVA.

Comparaison avec d’autres types de baux

Le bail emphytéotique est unique en son genre, mais il existe d’autres types de baux qui ont leurs propres caractéristiques. Voici une comparaison succincte avec quelques-uns des baux les plus courants :

  • Bail d’habitation :
    • Durée : Généralement de courte durée, souvent d’un an renouvelable.
    • Objet : Location de logements destinés à la résidence principale.
    • Droits : Le locataire a le droit d’occuper les lieux, mais ne peut pas effectuer de modifications majeures sans l’accord du bailleur.
  • Bail commercial :
    • Durée : Souvent d’une durée de 9 ans, mais peut être renouvelé.
    • Objet : Location de locaux pour une activité commerciale.
    • Droits : Le locataire bénéficie d’une certaine protection contre l’expulsion et peut renouveler le bail à des conditions similaires.
  • Bail à construction :
    • Durée : Peut varier, mais généralement de longue durée.
    • Objet : Le locataire s’engage à construire sur le terrain du bailleur.
    • Droits : À la fin du bail, les constructions reviennent généralement au bailleur, sauf stipulation contraire.
  • Bail emphytéotique :
    • Durée : Très longue, souvent entre 18 et 99 ans.
    • Objet : Le locataire peut jouir du bien et effectuer des améliorations majeures.
    • Droits : L’emphytéote a des droits étendus sur le bien, presque équivalents à ceux d’un propriétaire.

Philippe

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