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Division nominale et regroupement des actions d’une société

Par Philippe , le 11 janvier 2021 , mis à jour le 28 septembre 2023 - 8 minutes de lecture

Le capital social d’une société par actions est divisé en un nombre donné d’actions disposant toutes d’une valeur nominale – autrement dit d’une « valeur faciale » – identique.

Or, deux sociétés dotées d’un capital social d’un montant identique sont susceptibles de faire apparaître au sein de leur capital un nombre d’actions différent. Il est en effet possible de diviser librement le capital en un nombre d’actions souhaité en faisant varier la valeur nominale par action.

Par exemple, une société disposant d’un capital de 100.000 euros pourra alternativement choisir de répartir son capital :

– En 100.000 actions d’une valeur nominale de 1 euro chacune.

– En 100 actions d’une valeur nominale de 1.000 euros chacune.

– En 10.000.000 actions d’une valeur nominale de 0,01 euro chacune, etc…

Le présent article vise à présenter les opérations de regroupement d’actions et de division du nominal, lesquelles permettent de modifier la valeur nominale des actions d’une société sans augmenter ni réduire le montant total du capital.

Division de la valeur nominale des actions

Définition de l’opération de division du nominal

La division de la valeur nominale des actions est une décision de l’Assemblée générale extraordinaire d’une société consistant à multiplier le nombre d’actions composant le capital social sans pour autant augmenter le montant de ce capital.

Intérêts liés à la division de la valeur nominale

Tel que rappelé par le cabinet d’avocats d’affaires Billand & Messié, il est courant qu’une société ayant initialement ouvert son capital à un nombre limité d’associés souhaite permettre l’entrée d’associés très minoritaires disposant de participations limitées (0,1% par exemple) ou symboliques (0,01%).

Dans un tel cas de figure, l’existence d’un nombre trop réduit d’actions au sein du capital de la société peut constituer un obstacle de taille puisque l’attribution de la moindre action donnera accès à un pourcentage trop élevé du capital social.

Exemple : une Société A dispose d’un capital de 10.000 euros divisé en 100 actions de 100 euros de valeur nominale chacune. Le dirigeant souhaite céder des actions à 10 de ses salariés représentant 0,1% du capital pour chaque salarié. Dans ce cas de figure, l’attribution d’une action à un salarié reviendrait à octroyer 1% du capital à chaque salarié, soit 10 fois plus que le pourcentage de participation ciblé.

Solution : procéder à la division de la valeur nominale des actions par 100 afin d’obtenir un capital de 10.000 euros divisé en 10.000 actions (au lieu de 100 actions). Chaque salarié se verra ainsi attribuer 10 actions représentant effectivement 0,1% du capital social initial.

La division de la valeur nominale (share split) est aussi utilisée par les sociétés, notamment celles cotées en bourse, afin d’augmenter le nombre d’actions en circulation et de favoriser la liquidité du titre. Réduire la valeur nominale induit mécaniquement une diminution du ticket d’entrée et favorise notamment la passation d’ordres par des investisseurs disposant d’une capacité d’investissement limitée, et par définition plus nombreux (d’où l’augmentation de la liquidité du titre).

Pour information, après la division d’actions réalisée par Apple en 2020, le prix de l’action a chuté d’environ 400 $ à 100 $, mais le nombre total d’actions en circulation a été multiplié par quatre.

Procédure juridique permettant de diviser la valeur nominale des actions

La division de la valeur nominale des actions est une modification des statuts de la société. À ce titre, cette opération relève des pouvoirs de l’Assemblée générale extraordinaire des actionnaires ou des associés.

La documentation suivante doit notamment être élaborée :

  • Rédaction du rapport du Dirigeant (Conseil d’administration d’une SA, Président d’une SAS etc…).
  • Lettre de convocation et texte des résolutions.
  • Rédaction du procès-verbal d’assemblée générale.
  • Rédaction d’une feuille de présence.
  • Production des statuts modifiés et enregistrement auprès du Greffe du Tribunal de commerce.

Suite à la division du nominal, les comptes d’associés et les registres de mouvements de titres doivent être modifiés afin de faire apparaître l’opération de division de la valeur nominale ainsi que la nouvelle valeur nominale des actions.

Regroupement d’actions

Définition du regroupement d’actions

L’opération de regroupement d’actions (reverse share split) est diamétralement opposée à celle de division du nominal : cette opération consiste à augmenter la valeur nominale des actions composant le capital social et à diminuer le nombre d’actions sans modifier le montant dudit capital.

Cas d’utilisation du regroupement d’actions

Le regroupement d’actions est principalement utilisé par les sociétés cotées en bourse. Lorsque le cours d’une action est devenu trop faible, il est symboliquement pertinent (voire impératif) de le rehausser artificiellement via le regroupement d’actions.

Exemple : le capital d’une société B cotée sur Euronext est composé de 100 millions d’actions dont le cours s’élève à 0,16 centimes. Estimant ce cours effrayant et décourageant au regard du cours historique de la société B, ses dirigeants décident de procéder à un regroupement d’actions. Les 100 millions d’actions sont alors regroupées en 10 millions d’actions et la valeur nominale des actions est mécaniquement multipliée par 10. Au résultat de cette opération, le cours de bourse par action s’élèvera théoriquement à 1,6 euros au lieu de 16 centimes.

Procédure liée au regroupement d’actions

L’assemblée générale extraordinaire est habilitée à décider le regroupement d’actions et une procédure identique à celle relative à la division de la valeur nominale est applicable.

Assemblée générale extraordinaire décidant d'un regroupement d'actions

Impact de la division et du regroupement d’actions sur les actionnaires

Lorsqu’une entreprise décide de diviser ou de regrouper ses actions, les actionnaires existants peuvent être directement affectés de plusieurs manières :

  • Dilution ou concentration des participations : dans le cas d’une division d’actions, bien que le nombre total d’actions qu’un actionnaire détient augmente, sa participation proportionnelle dans l’entreprise reste inchangée. Inversement, lors d’un regroupement d’actions, le nombre d’actions détenues par un actionnaire diminue, mais sa part proportionnelle de l’entreprise demeure constante.
  • Liquidité des actions : la division d’actions peut augmenter la liquidité des actions en rendant le prix par action plus abordable pour les investisseurs, ce qui peut faciliter l’achat et la vente d’actions. À l’inverse, un regroupement d’actions peut réduire la liquidité si le prix par action devient trop élevé pour la plupart des investisseurs.
  • Perception du marché : les mouvements significatifs dans la structure des actions peuvent influencer la manière dont les investisseurs perçoivent la santé financière et la stratégie de l’entreprise. Une division d’actions peut être perçue comme un signe de confiance dans la croissance future, tandis qu’un regroupement d’actions peut être interprété comme une mesure corrective en réponse à un cours d’action faible.

La structure du capital reflète la stratégie et la vision d’une entreprise.

Les conséquences fiscales de la division et du regroupement d’actions

La division ou le regroupement des actions d’une entreprise peut avoir des implications fiscales pour la société ainsi que pour ses actionnaires.

  • Plus-values et moins-values : pour les actionnaires, la division ou le regroupement des actions ne déclenche généralement pas d’événement imposable en soi. Cependant, cela peut affecter le prix de revient unitaire des actions, ce qui peut avoir des conséquences sur le calcul des plus-values ou des moins-values lors de la vente ultérieure des actions.
  • Distribution de dividendes : la manière dont les dividendes sont distribués et imposés peut être influencée par la structure des actions. Bien que le montant total des dividendes distribués par l’entreprise ne change pas, le montant reçu par action peut varier, ce qui peut influencer les décisions fiscales des actionnaires.
  • Droits d’enregistrement : dans certaines juridictions, les modifications apportées à la structure des actions peuvent entraîner des frais ou des droits d’enregistrement. Il est essentiel de vérifier les réglementations locales pour s’assurer de la conformité et éviter les pénalités inattendues.
  • Implications pour l’entreprise : bien que la division ou le regroupement des actions n’ait généralement pas d’impact direct sur l’impôt sur les sociétés, les changements dans la perception du marché et la valeur de l’entreprise peuvent influencer les évaluations et les stratégies fiscales à long terme.

L’intervention d’un expert fiscal est souvent recommandée avant de procéder à des modifications de la structure des actions, afin de comprendre les implications fiscales et planifier en conséquence.

Philippe

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